« Le législateur doit proposer une nouvelle loi interprétative »
L’unanimité n’est certainement pas de ce monde, mais le Conseil constitutionnel fait exception à cette règle. Pouvoir, opposition et société civile ont tous jubilé saluant sa décision 1/c/2025, tant celle-ci semble conforter les uns et les autres dans leurs positions divergentes. En effet, en déclarant non conforme à la constitution l’article premier de la loi Amadou Ba (numéro 2) du 2 avril 2025, les sages ont profité de l’occasion pour circonscrire le champ d’application de cette loi d’amnistie trop permissive.
Cependant, le ‘’mutisme’’ du Conseil sur l’article 2 de la loi interprétative laisse subsister des interrogations. Du moins selon le Pr agrégé en droit, Jean Louis Corréa. Invité de l’émission Objection de ce dimanche sur Sud Fm, le rapporteur de la commission technique des assises de la justice, pose la question de savoir : « lorsque le conseil est saisi pour déclarer contraire à la constitution une loi, et qu’il décide de déclarer contraire à la constitution l’article premier de cette loi en laissant le deuxième article, est-ce que cette loi va toujours subsister ? ».
Avouant n’avoir pas une réponse précise à cette question, M. Corréa pense que « pour un principe d’ordre il serait bon que le législateur propose une nouvelle loi interprétative ». Celle-ci viendrait, selon le Pr agrégé de droit, s’arroger la précision faite par le conseil sur le champ d’application de l’amnistie.
« L’article premier de cette nouvelle proposition viendrait reprendre ce que le Conseil a déjà dit. Mais comme l’article deux de la loi interprétative du 2 avril n’a pas été déclaré contraire à la constitution par le Conseil constitutionnel qui a été saisi sur la totalité de la loi. Pourtant le Conseil s’est intéressé à l’alinéa 2 de l’article premier, il a statué ultra petita. Donc s’il voulait parler de l’article 2 de la loi interprétative, il l’aurait fait librement. Ainsi, le conseil n’ayant pas déclaré contraire à la Constitution l’article 2, celui-ci subsiste », suggère-t-il.
Donc, conclut le vice-recteur de l’université numérique Cheikh Amidou Kane, « il faudrait qu’on ait une nouvelle loi interprétative qui vient préciser le sens de l’article premier de la loi d’amnistie de 2024 et qui récupère l’article 2 de la loi de 2025 qui porte sur la possibilité de réparer le préjudice subi par les victimes ». Car, croit-il, « ce n’est pas ordonné de laisser un article 2 subsister alors que l’article premier est déclaré non conforme par le conseil constitutionnel ».
Une manière, à l’en croire, de lever tout équivoque. « Tout le monde ergote pour dire quelle est la conséquence du mutisme du conseil sur l’article 2. Il faut une nouvelle loi interprétative », insiste-t-il.